Gilles BERNHEIM, un second mensonge, un souci et sa source

Posté par Jean-Noël Darde

5 avril 2013

Gillles Bernheim a, comme Grand Rabbin de France, publié le 20 mars dernier un premier communiqué dans lequel il se défaussait sur le philosophe Jean-François Lyotard d’une accusation implicite d’un plagiat découvert par Pierre Gerardey dans l’ouvrage Quarante méditations juives paru en 2011 aux éditions Stock.

Devant les preuves accablantes, le mardi 2 avril, Gilles Berheim a reconnu dans un communiqué (cf Gilles Bernheim, l’aveu) que la 26e des 40 méditations de son ouvrage avait été plagiée sur des textes d’Élisabeth Weber et de Jean-François Lyotard publiés dans Questions au judaïsme (Éditions Desclée de Brouwer, 1996). Il oubliait cependant de citer parmi les plagiés déjà avérés : Jean Grosjean, Élie Wiesel, Charles Dobzynsky; Jean-Marie Domenach et les autres.

Ces plagiats mis sur le compte de la trahison d’un nègre, Gilles Bernheim affirmait solennellement avoir pour la toute première fois de son activité d’écrivain fait appel à un nègre pour la documentation et la rédaction de cet ouvrage.

Si on fait l’hypothèse de la sincérité de Gilles Bernheim, au moins à ce propos, on est obligé d’en conclure que d’éventuels plagiats dans des livres signés par lui et publiés antérieurement aux Quarante méditations sont, osons le dire, de la propre main du Grand Rabbin de France.

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Gilles Bernheim, alias Marin Cureau de la Chambre, médecin ordinaire du roi

Le souci des autres au fondement de la loi juive, signé par Gilles Bernheim, a été publié en 2002 aux Éditions Calman-Lévy. Citons au titre de premier exemple, les pages 30 et 31 de cet ouvrage.

Le Grand Rabbin de France, familier des Midrach , présente certains de ces commentaires religieux hébraïques. Celui qu’il évoque page 30 et 31 traite des larmes.

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« Toutes les larmes sont des pleurs, mais tous les pleurs ne sont pas des larmes » nous dit, selon Bernheim, ce Midrach. Lui fait écho, Marin Cureau de la Chambre (1594 – 1669), médecin ordinaire du roi, cité par Jean-Loup Charvet.

Le Médecin de la chambre du roi aurait-il tout piqué dans le Midrach ?

C’est peu probable puisque la suite du texte, ici surligné en orange, est de toute évidence plagié par Gilles Bernhein sur un élégant et érudit ouvrage de Jean-Loup Charvet, L’éloquence des larmes, paru en 2000, soit deux ans avant l’ouvrage qui vaut du souci au Grand Rabbin.

Toutes les larmes qui débordent des pages 30 et 31 du livre Le souci des autres au fondement de la loi juive sont en réalité les mêmes qui ruisselaient d’érudition dans l’ouvrage de Jean-Loup Charvet, « haute-contre et historien de l’art qui [a mené] une recherche sur le sens des larmes à l’époque Baroque » comme le précise Benoit Chantre, son éditeur. Desclée de Brouwer avait aussi édité en 1996 Questions au judaïsme, évoqué précédemment à propos des plagiats reconnus par Bernheim de l’entretien Weber-Lyotard.

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Gilles Bernheim, alias Jean-Loup Charvet

On trouvera une présentation et une analyse plus complète de ce premier plagiat dans un article qui sera prochainement mis en ligne :

« Le souci des autres : quand Gilles Berheim faisait chanter un haute-contre »

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Les traces sur Internet

Comment sommes-nous arrivé à ces nouveaux plagiats ?  Compte tenu qu’il est rare qu’un auteur soit le plagiaire d’un seul plagiat, et une fois écartés les ouvrages d’entretiens, moins favorables à cette pratique, Jean Nehoray s’est intéressé au Souci des autres dont une version google.books est accessible en ligne. Une fois repérées deux pages dont le style tranchait avec d’autres pages du même livre, ces dernières, plus quelconques, peut-être rédigées par Gilles Bernheim lui-même, Jean Henoray a lancé cette seule phrase sur Google  :

On ne pratique pas les larmes, on est gagné par les larmes. Elles sont sans doute un degré ultime de conscience, un moment d' »attention extrême ».

Cette phrase a donné accès au site « Même si » qui en précisait la source : L’éloquence des larmes de Jean-Loup Charvet. Il ne restait plus qu’à faire un tour en bibliothèque, repérer cette phrase dans Le souci des autres et faire une lecture attentive des textes qui la précédent et lui succédent et de les comparer à l’ouvrage de J.-L. Charvet. Notons qu’ici, les logiciels anti-plagiat n’ont pas été utilisés et ne pouvaient l’être.

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Nous avons fait état hier, en fin d’après-midi, de la découverte de ces nouveaux plagiats, qui en annoncent d’autres, lors d’un entretien téléphonique avec Moché Lewin, le porte-parole du Grand Rabbin de France. La démission de Gilles Bernheim marquerait une importante étape de cette affaire. Rappelons que c’est Gilles Bernheim lui-même, en accusant Jean-François Lyotard, qui a donné à ses plagiats une allure universitaire qui a conduit à leur analyse sur le blog Archéologie du copier-coller.

C’est maintenant au tour de Geneviève Fioraso, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de se pencher enfin sur d’autres situations aberrantes – beaucoup plus aberrantes encore, au regard  des plagiats, que celui du « plagiat universitaire » de Gilles Bernheim.

Geneviève Fioraso a déjà été alertée par nos soins et de manière circonstanciée de ces situations (courrier recommandé AR auquel elle a fait répondre par une forme de non-recevoir). Elle n’a donc rien fait.

Valérie Pécresse, elle aussi alertée en son temps par nos soins (courrier recommandée AR qui avait été l’objet d’une réponse par ses services, très convenue et sans le moindre effet) avait  fait preuve de la même étonnante passivité.

Dans un article prochainement mis en ligne sur ce blog – « Gilles Bernheim, Imad Saleh et leurs nègres » (titre provisoire) – nous comparerons, du seul point de vue de leur nature, les activités plagiaires respectives du Grand Rabbin de France et du Professeur Imad Saleh, membre du Conseil national des universités.

En attendant, citons parmi les articles les plus récents  mis en ligne sur ce blog (liste complète au bas de la page d’accueil), les plus à même à préparer à la lecture de l’article annoncé :

Janvier 2013 :

La Commission permanente du Conseil national des universités (CP-CNU), le « vide juridique » et la tolérance au plagiat

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Décembre 2012

REFUSONS DE FERMER LES YEUX SUR LE PLAGIAT DANS LA RECHERCHE

Plus de 200 universitaires, dont des universitaires plagiés, affirment…

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Juin 2012

400 PAGES DE PLAGIATS, 20,33 EUROS !

Quand l’Université édite, diffuse et vend des thèses plagiaires

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Mai 2012
L’université Paris8, sa direction, sa Commission déontologie et sa thèse-pur-plagiat écrite « sous le signe de l’excellence »

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etc….

En complément :

http://www.lexpress.fr/culture/livre/l-autre-mensonge-du-grand-rabbin-bernheim_1237622.html

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6 réponses to “Gilles BERNHEIM, un second mensonge, un souci et sa source”

  1. Cette affaire confirme que la pratique du plagiat est rarement ponctuelle – le fait malheureux d’un auteur qui a failli accidentellement -, mais bien une méthode d’écriture par procuration, parfaitement au point chez certains publiants – inutile de parler d’auteurs, et encore moins d’écrivains.

    Encore que ces types de livres soient quelquefois les plus lus, puisqu’ils sont plus des produits de promotion d’une personnalité ou d’une institution qu’un véritable travail intellectuel s’inscrivant dans une réflexion personnelle.

    Hélène MAUREL-INDART

     

    Hélène Maurel-Indart

  2. Un Grand Rabbin, haute autorité morale de sa communauté, qui pille divers auteurs pour publier des livres qu’il n’a pas le temps d’écrire, c’est le monde à l’envers. Un ministre du budget qui fraude le fisc, c’est le monde à l’envers.
    Quand de tels renversements scandaleux sont connus, ils provoquent à juste titre des vagues de réactions indignées, des démissions et d’éventuelles poursuites judiciaires.
    Il serait temps que les autorités universitaires se rendent compte qu’un enseignant qui plagie sa thèse ou n’importe laquelle de ses publications, c’est aussi le monde à l’envers, et qu’elles doivent cesser de se montrer complaisantes vis-à-vis des enseignants-chercheurs plagiaires, comme c’est le cas par exemple depuis des années à Amiens et à Paris 8.
    Boris EIZYKMAN

     

    Boris EIZYKMAN

  3. Comité de soutien au Grand Rabbin de France
    Bonjour,
    À la demande du Président de la Grande synagogue de la Victoire, Jacques Canet, et suite
    aux nombreux appels que nous recevons, nous vous informons que nous nous joignons au Comité de soutien au Grand Rabbin qui se constitue.
    Nous vous transmettons ci-après le texte du communiqué que nous venons de recevoir. Vous pouvez rejoindre ce Comité de soutien en écrivant aux adresses indiquées. Merci de relayer cette information.
    Bien cordialement,
    Gilberte Behar
    Secrétaire Générale

    « Au coeur de l’épreuve qu’il traverse, et face au lynchage médiatique ainsi qu’aux tentatives d’instrumentalisation orchestrées par certains médias et par certains milieux, nous réitérons au Grand Rabbin de France, Gilles Bernheim, toute notre estime et toute notre confiance dans la mission qui est la sienne à la tête du rabbinat de notre pays.
    Dans le cadre de ses fonctions au service du judaïsme français, le Grand Rabbin Bernheim œuvre avec détermination, respect et ouverture.
    Envoyez vos noms et signatures à l’adresse suivante :

    phmeyer92@gmail.com
    avec copie à : janine.riveline@orange.fr

    Lynda BOCCARA

    JND : rappelons une fois de plus que le blog Archéologie du copier-coller s’intéresse d’abord au plagiat à l’Université.
    C’est bien Gilles Bernheim lui même, en accusant l’universitaire et philosophe Jean-François Lyotard d’être son plagiaire, qui a fait entrer ses propres plagiats dans le champ des affaires de plagiat traitées sur ce blog.

     

    Lynda BOCCARA

  4. Loin de moi l’idée de critiquer un homme que je ne connais pas, mais j’ai du mal à pardonner qu’il ait accusé un universitaire brillant de l’avoir plagié, pour mieux se défausser de ses propres mensonges.
    Mon imagination le représente, à un moment donné, assis à son bureau, pesant le choix de demander pardon, et préférant salir le nom d’un mort.
    R. THIBAULT

     

    Romain THIBAULT

  5. J’ai cherché dans le Midrach (avec les bases informatisées, c’est aujourd’hui facile et rapide) cette citation «Toutes les larmes sont des pleurs, mais tous les pleurs ne sont pas des larmes», je n’ai rien de trouvé de semblable.

    Avec seulement le mot דמעות, « larmes » en hébreu, avec ou sans l’article défini ה , on trouve 90 occurrences dans l’ensemble des Midrachim classiques, mais rien qui se rapproche de cette « citation ».

    Avraham MALTHETE

    JND : Avraham MALTHETE est bibliothécaire et paléographe.
    Comme nous l’avons montré, « Toutes les larmes sont des pleurs, mais tous les pleurs ne sont pas des larmes », doit, selon Jean-Loup Charvet (L’Éloquence des larmes, Desclée de Brouwer, 2000), être attribué à Marin Cureau de la Chambre, Médecin ordinaire du roi (Les Charactères des Larmes, p. 102 in Les Charactères des passions, Paris, Pierre Rocolet, 1640.
    Ce cas est présenté dans : Le souci des autres : quand Gilles Berheim faisait chanter un haute-contre.

     

    Avraham MALTHETE

  6. Ce texte, L’Éloquence des Larmes, m’a consolée et accompagnée. Un texte auquel va ma gratitude, un texte que j’ai eu envie de partager sur mon petit blog confidentiel et un texte, qui sait ? que l’on pourrait bien s’incorporer à force de le remâcher.
    Je dois beaucoup à Jean-Loup Charvet. Merci de m’avoir citée en expliquant votre cheminement. Me voici assez ébaubie sortie pour un temps de l’ombre qui m’est familière.
    Élise L.

     

    Elise L.