LES ABATTIS DU PROFESSEUR PIERRE JOURDE
Mis en ligne le 11 juin 2013, dernière modification le 12 juin.
Un universitaire et polémiste de mauvaise foi
Sur son blog édité par Biblios-Le Nouvel Observateur, « Pierre Jourde, écrivain » a signé une charge à mon encontre, Jean-Noël Darde : Le Torquemada du plagiat.
L’écrivain Pierre Jourde, heureusement pour lui, n’a en réalité pas grand-chose à voir avec ce texte. C’est le Jourde professeur d’université allié au Jourde polémiste qui me mettent en cause : l’universitaire par les sujets traités, l’évaluation de ma thèse et de mes activités universitaires, et le polémiste par le ton.
Pour conclure son article, Pierre Jourde, professeur d’université et polémiste, ne peut s’empêcher de faire le fier-à-bras : Je n’ai plus désormais qu’à numéroter mes abattis, en attendant de voir mes textes passés à la moulinette anti-plagiat.
Je n’ai pas la moindre raison de penser que Pierre Jourde est un plagiaire, ni comme écrivain, ni comme polémiste, ni même comme professeur. J’ai pour principe de ne jamais passer a priori un texte dans quelques moulinettes anti-plagiat que ce soit, sans disposer préalablement d’indices sérieux qui suggèrent l’hypothèse plagiaire fondée – des indices le plus souvent relevés à la suite d’une simple lecture attentive du texte. J’ai d’ailleurs critiqué l’usage a priori et systématique de ces logiciels anti-plagiat par certaines universités. Ces contrôles sont en plus faciles à déjouer : mon collègue Khaldoun Zreik, par exemple, a signé des plagiats issus de traductions qui passent aisément l’épreuve du contrôle par Compilatio, le « logiciel anti-plagiat » le plus utilisé en France. J’ajoute que ces contrôles systématiques sont souvent un alibi pour ne pas traiter la question du plagiat universitaire au fond.
Pierre Jourde n’est pas le « courageux polémiste engagé » dont parlait Pierre Assouline (L’affaire Jourde laisse un goût amer. La République des Livres, 2007) dans un texte qui, sans contester ses talents d’écrivain, ne faisait pas l’impasse sur son absence de « tact élémentaire ». Pierre Jourde a ici perdu toute lucidité et en est venu à parler à mon égard de n’importe quoi, n’importe comment.
La hargne du professeur Jourde est d’autant plus déplaisante qu’il n’a pas fait le moindre effort pour s’informer avec sérieux. Pour l’essentiel, il s’est contenté de reprendre des propos calomnieux diffusés dans l’entourage d’enseignants-chercheurs, plagiaires avérés, que j’ai mis en cause. Pour le reste, Pierre Jourde a tordu quelques citations.
Les erreurs et les arguments de mauvaise foi qui se succèdent tout au long de l’article de Pierre Jourde témoignent sans laisser de place au moindre doute de sa volonté de me nuire. Plutôt que de parler d’une suite d’erreurs, il est plus juste de parler de propos de mauvaise foi tenus pour réjouir ceux que mes interventions sur le plagiat universitaire gênent. La majorité des commentateurs sur le blog de Pierre Jourde ont eux-mêmes remarqué que la ficelle était un peu grosse.
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Les origines de mon travail sur le plagiat
J’ai déjà clairement expliqué que je n’ai jamais choisi de m’intéresser au plagiat universitaire. Le problème du plagiat s’est imposé à moi à l’automne 2005, quand j’ai été confronté à du plagiat à l’échelle industrielle dans les mémoires du master Numérique : enjeux et technologies au département Hypermedia de l’Université Paris 8. Département qui abrite le gros du Laboratoire Paragraphe.
En mai 2006, lors d’une réunion, sept de mes collègues, dont deux responsables de département et un directeur adjoint d’école doctorale – Imad Saleh, le directeur du Laboratoire Paragraphe, dont Pierre Jourde paraît être un des plus fervents partisans – ont refusé à l’unanimité d’ouvrir une procédure de retrait de diplôme pour deux mémoires plagiés à près de 100%. Ces plagiats avaient permis à leurs auteurs d’obtenir brillamment leur DEA et de s’inscrire en thèse sous la direction du même membre du Laboratoire Paragraphe qui avait été le directeur peu consciencieux de leurs mémoires de DEA.
On peut se demander ce qu’aurait fait le professeur de littérature Pierre Jourde, auteur de l’article « La grande illusion universitaire », devant une telle situation, si elle s’était présentée à l’Université Grenoble III où il enseigne ? À lire la charge dont il m’accable, on est conduit à croire qu’il aurait laissé faire.
Moins de deux mois après cette réunion, le même Imad Saleh, directeur du Laboratoire Paragraphe, mais aussi alors Directeur adjoint de l’École doctorale Cognition, langage et interaction (il en est devenu depuis peu le Directeur), a autorisé l’un de ces deux doctorants à soutenir sa thèse en juillet 2006 : une thèse… plagiaire à près de 100% qui a valu à son « auteur » d’être félicité par le jury. Le président de ce jury sera quelques mois plus tard élu vice-président du Conseil scientifique de Paris 8 !
Une nouvelle fois : qu’aurait fait l’universitaire Pierre Jourde devant une telle situation ? À lire la charge dont il m’accable, on peut supposer qu’il serait resté ici encore sans réagir.
Pour ma part, j’ai alerté le président de l’Université Paris 8. Je n’ai finalement décidé de rendre ces affaires de plagiat publiques, en créant le blog Archéologie du copier-coller, qu’en janvier 2010, après avoir pendant près de cinq ans tenté en vain de résoudre en interne ces affaires de plagiat, comme le prouvent d’abondants échanges de courriels avec mes collègues.
Après différentes péripéties proches du grotesque, la validation de la thèse plagiaire à près de 100% a été confirmée par une Commission déontologie présidée par Élisabeth Bautier, vice-présidente du Conseil scientifique de Paris 8, où siégeaient les directeurs des quatre écoles doctorales de Paris 8. Ils en ont apprécié l’originalité (cf. L’Université Paris 8, sa direction, sa Commission déontologie et sa thèse-pur-plagiat écrite « sous le signe de l’excellence »).
Je parle d’abord de cette thèse plagiaire à près de 100%, mais, soutenues dans le même laboratoire, il y a d’autres thèses plagiaires en souffrance que, bien qu’alertés, Pascal Binczak, Président, et le Conseil scientifique de Paris 8 ont laissées en l’état [note 1].
C’est aussi simple que cela. Tout à sa démonstration bancale, Pierre Jourde a préféré ignorer ces épisodes depuis longtemps présentés sur mon blog. Ils sont pourtant à l’origine de mon intervention et de mon travail sur le plagiat universitaire. J’ajoute que la nature des pressions et des représailles dont j’ai alors été l’objet – pour une bonne part avec le soutien tacite, ou même actif, de la direction de l’Université Paris 8 – a renforcé ma détermination de ne pas céder. J’attends toujours la réunion d’une commission crédible qui décide de m’entendre pour faire état de ces pressions dans leurs détails et des donneurs d’ordre.
Ces situations ne choquent à l’évidence pas beaucoup le professeur de littérature Pierre Jourde, pas plus d’ailleurs que les présidents et la grande majorité des membres des Conseils d’administration et des Conseils scientifiques successifs de l’Université Paris 8. Pas plus d’ailleurs que les instances universitaires supérieures. Yves Jeanneret, Président de la 71e section du CNU, Dominique Faudot Présidente de la Commission permanente du Conseil national des universités, jusqu’à la ministre Geneviève Fioraso ont pourtant dûment été alertés de manière circonstanciée de ces situations. Aucune de ces personnes ne pourra soutenir qu’elle ne savait pas.
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Abattis
1) Pierre Jourde semble croire dans son article aux saines procédures de recrutement des universitaires par le Conseil National des Universités (quoiqu’il ait suggéré le contraire dans d’autres articles mis en ligne sur son blog). Il me reproche cependant, bizarrement, d’avoir critiqué les candidatures de collègues plagiaires avérés et celles de leurs soutiens aux élections de 2011 au Conseil National des Universités (CNU).
Les universitaires plagiaires seraient-ils selon le professeur Jourde les mieux à même de pratiquer la politique d’évaluation – que ce soit au CNU ou dans les Comités de sélection – qu’il a appelée de ses vœux sur son blog ? Que des plagiaires décident de la carrière de leurs collègues universitaires ne semble décidément guère le choquer.
Notons qu’un des universitaires plagiaires de Paris 8 dont j’ai parlé sur mon blog, Khaldoun Zreik, auquel Pierre Jourde fait allusion, n’a pas été élu au CNU. Quelques jours après cet échec, dont il m’a fait porter la responsabilité, K. Zreik m’en a demandé réparation. Le constat fait de sa mauvaise maîtrise des guillemets et de l’italique, le juge a annulé sa maladroite assignation contre moi (lire : Paris 8, procès et plagiats).
Imad Saleh, le second plagiaire que j’ai cité, a lui été élu à la 71e section (Sciences de l’information et de la Communication), dont peu de membres sont scandalisés par les plagiats les plus grossiers.
Ceci autorise Imad Saleh à afficher aujourd’hui, au vu et au su de tous, ses plagiats jusque dans sa notice biographique éditée et mise en ligne par la CP-CNU (Commission permanente du Conseil national des Universités) sur son propre site internet : http://www.cpcnu.fr/web/section-71/membres-de-la-section.
J’ai parlé d’une thèse « à près de 100% » plagiaire, mais on peut affirmer qu’en ce qui concerne l’article qu’il affiche en tête de sa notice biographique publiée par la CP-CNU (fichier pdf ici), il s’agit de plagiat à 100%. Pour s’en convaincre il suffit de comparer les deux articles ci-dessus. On comprendra vite, même le professeur Pierre Jourde, que dans le texte co-signé Rachid Meziani / Imad Saleh (fichier pdf, ici), ce dernier n’a pas écrit le moindre mot sinon son prénom et son nom qu’il a substitué aux prénom et nom du co-signataire de l’article d’origine plagié, Rodrigo Magalhães (fichier pdf, ici). Le propre Rodrigo Magalhães, le plagié, en témoigne ici (fichier.doc).
Du deuxième article de cette notice éditée et diffusée par la CP-CNU (voir ci-contre), Imad Saleh n’a pas non plus écrit grand-chose !
Auteur de l’intéressant article « Les facéties de la « bibliométrie », Pierre Jourde, professeur, serait d’ailleurs bien placé pour répondre au défi facétieux suivant : distinguer dans les « 5 publications caractéristiques de la spécialité », présentées par Imad Saleh dans sa notice biographique de membre du CNU mise en ligne par la CP-CNU, les articles, ou les parties d’articles, les pages… dont on puisse raisonnablement penser que ce membre du CNU les a rédigés de sa propre main.
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Vérifier ses sources
2) Le professeur Jourde affirme que j’aurais été exclu en 1998 du Laboratoire Paragraphe, dirigé depuis 2004 par Imad Saleh, serial-plagiaire avéré et, qui plus est, membre du CNU (71e section, Sciences de l’information et de la communication). Il sera bien en peine de le prouver puisque ceci est faux à 100%. On imagine qu’avant d’écrire cela, Pierre Jourde a pris la précaution de vérifier ce qu’on lui a raconté et qu’il est donc en mesure d’avancer les preuves d’une telle assertion. Je dispose malheureusement pour lui de la preuve irréfutable que cette affirmation tient de la fable malveillante.
En commentaire à l’article de Pierre Jourde, Alain Lelu, Professeur d’Université en Sciences de l’information et de la communication, et longtemps membre actif du Laboratoire Paragraphe écrivait d’ailleurs :
Bonjour,
Vous écrivez, dans votre texte « Jean-Noël Darde, Torquemada du plagiat », que Jean-Noël Darde a été exclu du Laboratoire Paragraphe en 1998.Il se trouve que j’ai été Maître de conférence à Paris 8 et membre actif de ce laboratoire de 1993 à 2000, et que je n’ai jamais eu connaissance d’un tel fait, grave pour la réputation de Jean-Noël Darde s’il était avéré. Pourriez-vous me préciser d’où vous tenez cette information ?
Merci d’avance,
Alain Lelu, professeur d’Université
Alors que Pierre Jourde a pris la peine de répondre à un « Thomas » anonyme, pour lui répéter encore qu’un « doctorat de de 3e cycle » n’a rien d’une thèse (voir plus bas), il n’a jamais répondu à Alain Lelu. Quand on a eu le « courage » de porter une telle accusation, il paraît assez lâche de se défiler au moment de devoir la justifier. J’attends donc, comme Alain Lelu, les preuves. Pierre Jourde ne semble pas prêt à les comparer avec les miennes devant ses lecteurs, puisqu’il a fermé les commentaires de son blog.
J’ajoute qu’il reste sur Internet des traces de mes activités à cette époque, 1997 et 1998, au moment même de ma prétendue exclusion du laboratoire Paragraphe. À titre d’exemple, ma participation aux séminaires du Laboratoire Communication et politique, dirigé par Dominique Wolton. Elle m’avait conduit à communiquer au colloque Médiation et Mimésis, organisé par le CELSA (Université Paris IV-Sorbonne), le CNRS et le laboratoire Communication et Politique, et à publier dans la revue de ce même laboratoire (Hermès n° 22, 1998, disponible en ligne).
Je comprends que Pierre Jourde n’ait rien trouvé sur Internet, rien notamment sur ces travaux signalés ci-dessus à titre d’exemple. Cela lui aurait interdit les effets faciles, par exemple affirmer que j’avais été exclu d’un laboratoire cette même année 1998 ou écrire «Je n’ai pas réussi à trouver trace [de l’activité de publication et de recherche de M. Darde]».
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Évaluation et mauvaise foi
3) Ici encore sous le signe de la mauvaise foi et de la malveillance, Pierre Jourde évalue ma thèse soutenue en 1983, Le journal l’Humanité et les évènements du Cambodge de 1975 à 1979. Les stratégies discursives d’une palinodie. Le professeur et polémiste m’oblige encore pour lui répondre et prouver sa mauvaise foi à jouer à un jeu devenu ridicule, tant les dés sont le plus souvent pipés, celui du « facteur d’impact » que là encore il critiquait avec raison dans l’article précité « Les facéties de la ‘bibliométrie’ ».
Cette thèse soutenue en 1983, une fois adaptée, a fait l’objet d’un livre, « Le Ministère de la vérité », publié en février 1984 aux éditions du Seuil. La thèse comme le livre ont été cités par des linguistes, des politologues et des historiens. Par exemple, puisque Pierre Jourde aime les « traces » – mais toutes les « traces » ne sont pas sur Internet… –, mon nom est cité une douzaine de fois, ce qui est beaucoup pour un seul ouvrage, dans « L’Implicite » de Catherine Kerbrat-Orecchioni, une linguiste dûment homologuée comme telle (Armand Colin, « collection U » 1984, 1998). Pour être encore plus précis, les renvois au « Ministère de la Vérité » occupent plus de trois pages du livre de C. Kerbrat-Orecchioni. Cette thèse a aussi été citée et référencée dans des articles et ouvrages d’autres linguistes, des politologues et des historiens ; je ne citerai à titre d’exemple que les noms de Pierre Encrevé et Gilles Fauconnier, deux linguistes dont je vois mal Pierre Jourde discuter la qualité, ou encore Alfred Grosser, politologue et historien. Je pourrais citer d’autres historiens, français et étrangers – on s’en doute, surtout des chercheurs spécialistes de l’histoire du communisme, les auteurs du Livre noir du communisme, par exemple. Ma thèse et ce livre sont régulièrement cités et mentionnés dans les bibliographies des mémoires, thèses et ouvrages de sciences politiques ou d’histoire sur la période des Khmers rouges. La presse lui avait fait un excellent accueil, Jeannine Verdès-Leroux, politologue et historienne, lui a notamment consacré une page dans le journal Libération et précise à son propos, dans son ouvrage Le réveil des sommambules (Fayard/Minuit, 1987) : « Tout le livre serait à citer et est donc à lire » ). Près de 25 ans après la soutenance, cette thèse me valait encore d’être invité à débattre sur France Culture à propos des réactions en France face au régime Khmer rouge. Une couverture presse très élogieuse donc, à l’exception attendue de la presse et des revues proches du Parti Communiste, plus réservées… et même hostiles, avec beaucoup de mauvaise foi, d’un niveau équivalent à celle de Pierre Jourde.
Enfin, cette thèse ne devait pas être aussi indigente que l’insinue Pierre Jourde avec beaucoup d’insistance, puisque Michel Foucault qui avait pris le temps de la lire et à qui j’avais soumis mon manuscrit destiné au Seuil – je l’en remercie dans mon introduction – avait accepté d’être mon directeur de thèse d’État pour travailler sur les régimes de vérité du discours de l’information (inscription en thèse d’État sous la direction de M. Foucault enregistrée administrativement début 1984, malheureusement quelques mois seulement avant sa mort). Cet exercice un peu ridicule et déplaisant que Pierre Jourde m’oblige à faire – la présentation de quelques éléments sur ma thèse en termes de « facteur d’impact » – est cependant nécessaire pour donner toute la mesure de la mauvaise foi du professeur de littérature de l’Université Grenoble 3.
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4) Il est vrai que comme pamphlétaire – je ne mets pas en cause ici l’écrivain –, les citations tronquées et le manque de rigueur sont chez Pierre Jourde des habitudes déjà anciennes. Jean-Luc Drouin du Monde des livres écrivait déjà en 2002 (le supplément littéraire du quotidien avait été traité de manière très excessive par Jourde dans son ouvrage La littérature sans estomac) :
« Voilà que cette dévotion à la brève analyse de comptoir gagne l’Université en la personne de Pierre Jourde, enseignant à Grenoble-III. (…) Cet ouvrage, fourre-tout que son manque de rigueur empêche de considérer comme un essai et dont le caractère pamphlétaire frise l’injure. (…) Oscillant entre la hargne, la mauvaise foi, l’accumulation de citations détachées de leur contexte…«
Thierry Guichard disait aussi à propos de l’usage des citations par Pierre Jourde dans le même ouvrage : « L’emploi de la citation a quelque chose du Canada dry : ça ressemble à une preuve, ça a le goût de l’irréfutable, mais ce n’est rien de tout cela ».
Cet article malveillant à mon égard, ce n’est donc pas seulement celui du polémiste mais aussi celui d’un universitaire, ici sans rigueur, prêt à faire dire aux citations ce qu’il lui convient pour faciliter ses démonstrations. En fait foi la citation retenue par Pierre Jourde du compte rendu du livre issu de ma thèse, et non pas de la thèse elle-même comme il le suggère, par Simone Bonnafous dans la revue Mots. La citation retenue est : « mais au total l’outillage linguistique est très pauvre ». Cette observation viserait donc selon le professeur Jourde mon doctorat (dont il s’entête un peu bêtement à répéter qu’il n’a rien d’une « thèse ») alors que Simone Bonnafous traite indiscutablement du livre tiré de cette thèse publié au Seuil qui ne se présentait pas comme un livre de linguistique, et où l’appareillage linguistique avait été considérablement allégé. Un Pierre Jourde de bonne foi aurait d’abord cité le début (ci-dessous, sans coupure d’aucune sorte) du compte rendu de S. Bonnafous qui semble se féliciter de cet allégement :
Le livre de J.N. Darde, paru en février aux éditions du Seuil constitue à mon avis une contribution très positive à l’analyse du discours de l’information.
Forme un peu vulgarisée d’une thèse de 3e cycle soutenue en 1983, ce livre a d’abord l’énorme avantage d’être très bien écrit, facilement compréhensible par des non-spécialistes et de lecture agréable. C’est sans aucun doute rendre service à l’analyse du discours que de ne pas la réduire à des travaux tellement techniques que ni les historiens ni les politologues ne peuvent en voir l’intérêt.
Simone Bonnafous n’avait d’ailleurs pas tort, puisque, comme elle le prévoyait, allégée d’une approche trop lourdement linguistique qui aurait pu les en détourner, ce livre a bien retenu l’attention de politologues et d’historiens. L’usage que Pierre Jourde a fait de la citation de Simone Bonnafous est une fois encore la preuve de sa mauvaise foi comme polémiste, mais surtout, et c’est plus grave, la preuve qu’il est ici de mauvaise foi comme universitaire. On le voit capable d’une parfaite déloyauté pour arriver à ses fins en termes d’évaluation d’une thèse qu’il n’a jamais lue.
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5) Restons sur le thème de la thèse puisque Pierre Jourde s’y accroche. Il écrit dans son article : « Il est parvenu à devenir maître de conférences sans soutenir de thèse, mais un simple doctorat de 3e cycle, équivalent light de la thèse, qui a disparu depuis une trentaine d’années ». Pierre Jourde tient tellement à cet argument assez ridicule qu’il le répète dans une réponse à un de ses commentateurs : « Il reste qu’il faut en général, même pour les locaux, pour devenir maître de conférences, des publications et une bonne thèse. Ce qui fait tout de même une différence avec un recrutement sur un simple doctorat de 3e cycle« .
L’insistance de Pierre Jourde à déprécier une thèse soutenue il y a trente ans tourne pour le coup vraiment à l’obsession maniaque. Il en est de même de sa dépréciation des thèses de 3e cycle en général. On peut seulement observer que la thèse de 3e cycle a été créée comme porte d’entrée à la carrière universitaire alors qu’auparavant la seule thèse qui existait, la thèse d’État, beaucoup plus importante, était souvent soutenue une fois cette carrière déjà avancée. La thèse d’État a coexisté quelque temps avec la thèse de 3e cycle, d’où mon inscription auprès de Michel Foucault une fois soutenue cette dernière. Puis la thèse d’État a été supprimée. Enfin, est arrivée la nouvelle thèse dont on peut parfois douter, quand on prend connaissances des thèses plagiaires présentése sur ce blog, qu’elles soient toujours de haut niveau.
Notons seulement qu’à l’époque des thèses de troisième cycle tant décriées par Pierre Jourde, je n’ai jamais entendu parler d’une Commission déontologie présidée par une Vice-présidente d’un Conseil scientifique et qui aurait, avec le soutien du Président de l’université, confirmé le titre de docteur attribué à l’auteur d’une thèse plagiaire à près de 100% comme cela a été, comme je l’ai démontré, récemment le cas à l’Université Paris 8.
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6) Contrairement à l’affirmation de Pierre Jourde, je ne « passe pas [mon] temps à traquer partout les plagiaires ». Mis à part des mémoires plagiaires, qui m’ont conduit à des thèses plagiaires, tous soutenus dans mon propre département à l’Université Paris 8, ou liés à eux, je ne suis jamais allé de ma propre initiative chercher des plagiats dans d’autres établissements universitaires.
Tous les cas extérieurs au département Hypermedia de Paris 8 que j’ai traités sur mon blog l’ont été à la suite d’initiatives et de demandes de collègues – pour une part, des plagiés – qui m’ont soumis des affaires de plagiat auxquelles ils étaient confrontés (la dernière en date m’a été soumise par des enseignants-chercheurs algériens, elle concerne une thèse grossièrement plagiaire soutenue en France et dont s’est prévalu son auteur pour obtenir un poste dans une université algérienne).
Il en a été de même pour les plagiats du grand rabbin de France Gilles Bernheim : je m’y suis intéressé parce qu’il n’était pas inutile de montrer que Jean-François Lyotard, philosophe longtemps professeur à Paris 8 et accusé par Gilles Bernheim, n’était pas un plagiaire… Notons qu’il n’est jamais venu à l’idée de la direction de Paris 8 et de son Conseil scientifique de s’élever contre les accusations absurdes du grand rabbin de France à l’encontre d’un éminent professeur qui a enseigné près de vingt ans dans cette université.
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7) À propos de ma présentation des plagiats de la thèse dont j’ai affirmé qu’elle était plagiaire à près de 100%, Jourde précise « On s’aperçoit ici que la certitude précède parfois la preuve« . Tout à sa démonstration, ici encore de parfaite mauvaise foi, il oublie de dire que pour les trois quarts environ de cette thèse, les sources des plagiats, en grande majorité des ouvrages imprimés inaccessibles sur Internet, ont été établies et sont mentionnées sur mon blog Archéologie du copier-coller. Pour le dernier quart, ma conviction d’avoir à faire à des plagiats est fondée sur l’observation précise et raisonnée de certaines caractéristiques de ces textes. Mais comme il s’agit d’emprunts à des sources imprimées absentes du Net, la découverte du document original plagié n’en est pas facilitée (cf. L’université Paris 8, sa direction, sa Commission déontologie et sa thèse-pur-plagiat écrite « sous le signe de l’excellence »).
Si j’ai bien compris, quand j’obtiens des preuves certifiées à 100%, Pierre Jourde y voit le fruit d’un travail de maniaque, et quand je n’arrive pas complètement à ce niveau de preuve, mes affirmations seraient sans fondement et scandaleusement gratuites…
De la part de Pierre Jourde, le professeur d’université, tout ceci n’est ni sérieux, ni très honorable. Comme écrivain, il est libre d’inventer ce qu’il souhaite, du moment que ce soit de la bonne littérature. Mais comme universitaire qui prétend juger d’un travail sur le plagiat, il devait faire preuve d’un minimum de rigueur, vérifier ses sources et respecter un minimum la vérité.
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Enfin, j’ai eu aussi, comme auteur, des activités « alimentaires » ce qui n’a rien d’exceptionnel. Quand on écrit un ouvrage grand public sur les climats, il n’est pas incongru de mentionner un « diplôme de géographie », en l’occurrence une licence. Ajoutons qu’un ouvrage qui a connu plus de 20 éditions (d’abord aux éditions André Balland, puis chez Hachette) ne doit pas être complètement inutile… J’ai eu aussi des activités d’éditeur. Et puisque tout intéresse Pierre Jourde dans ma biographie, en cherchant mieux sur Internet et ailleurs il aurait pu tomber sur les traces lointaines de grands reportages en Amérique latine et même des traces encore plus lointaines d’activités, certainement à ses yeux, bien plus compromettantes.
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Quelle mouche a piqué le professeur Pierre Jourde ?
Je pourrais ainsi reprendre un par un le reste des reproches que m’a adressés Pierre Jourde et continuer à démontrer sa mauvaise foi.
Quelle mouche a piqué le professeur Jourde ? Pourquoi tant de sollicitude vis-à-vis d’universitaires plagiaires ? Pourquoi cette charge à mon encontre fondée sur tant de mauvaise foi ? Cette polémique mal étayée ressemble à un mauvais règlement de compte, avec une erreur d’aiguillage puisque je n’ai, que je sache, jamais eu le moindre compte à régler avec lui.
Le titre de son texte cependant, la référence à Torquemada, le contexte, la date, l’utilisation et la diffusion de cet article conduisent à ne pas exclure les effets de la récente affaire Gilles Bernheim. Mais pour discréditer mon travail sur le plagiat, l’universitaire Pierre Jourde s’est aligné sur la violence et la mauvaise foi de mes collègues plagiaires de l’Université Paris 8 et de leurs soutiens au sein même de la direction de Paris 8 et a repris leurs mauvais arguments. Ce professeur d’université s’est facilement laissé influencé et a fait le choix du dénigrement systématique sans jamais se préoccuper de la réalité des faits.
Il est peu honorable de plagier, a fortiori pour un universitaire. C’est pourquoi, avant d’affirmer que mes collègues Khaldoun Zreik et Imad Saleh, ce dernier membre du CNU, sont indiscutablement des plagiaires, j’ai pour ma part pris la peine de l’établir de manière irréfutable (« maniaque » pour Pierre Jourde); c’est un minimum. Avant d’avancer des propos aussi calomnieux qu’imprudents à mon égard, Pierre Jourde aurait dû respecter la même démarche.
Il y trois ou quatre ans, j’avais assisté à une intervention de Pierre Jourde au Collège de France dans le cours d’Antoine Compagnon. Il avait parlé avec sincérité du « Pays perdu » et du lynchage que son livre lui avait valu. La sincérité lui a manqué ici. Il se noie dans la mauvaise foi pour poursuivre un seul but, disqualifier mon travail et se porter au secours de plagiaires indéfendables : Gilles Bernheim, Imad Saleh et Khaldoun Zreik réunis ici dans un curieux attelage.
Le bon polémiste est cinglant sur des sujets qu’il maîtrise. La vérité de ce qu’il avance le préserve d’un effet boomerang. La hargne et la mauvaise foi, patentes ici, font de mauvais polémistes. Je pense que non seulement Pierre Jourde le polémiste refusera de reconnaître la mauvaise foi dont il a fait preuve à mon égard, mais aussi Pierre Jourde le professeur d’université. C’est plus grave : habilité à diriger des recherches, Pierre Jourde a montré ici que sa mauvaise foi pouvait l’aveugler quand il s’agit de les évaluer.
Jean-Noël Darde
MCF – Université Paris 8
Note 1 : Évoquons cette thèse plagiaire (cf. www.jacquesbolo.com/html/plagiat.html et http://archéologie-copier-coller.com/?p=1658), soutenue devant un jury présidé par Khaldoun Zreik, dont un des plagiés, Jacques Bolo, s’est plaint auprès de Pascal Binczak, Président de l’Université Paris 8, par courrier recommandé AR le 21 février 2011. Ce dernier n’a pas même pris la peine de lui répondre. Jacques Bolo a réitéré le 8 avril 2013, sans plus de succès, sa demande auprès de Danielle Tartatowsky, l’actuelle Présidente de Paris 8 qui a succédé en juin 2012 à Pascal Binczak.
Copie de son courrier à la Présidente de Paris 8 envoyée à la ministre le 27 avril, Jacques Bolo a reçu du ministère une réponse datée du 4 juin 2013. Éric Piozin, de la Direction générale pour l’enseignement supérieur y précise : « J’ai rappelé à la présidente de l’université la procédure disciplinaire applicable en la matière, étant considéré qu’un acte obtenu par fraude peut être retiré à tout moment« . Ce qui ressemble bien à un désaveux de l’attitude antérieure de Pascal Binczak et de Danielle Tartakowsky et à une mise en demeure d’agir.
Jacques Bolo n’a cependant pas, jusqu’à ce jour, été avisé par la direction de l’Université Paris 8 de l’ouverture d’une procédure (le cas de cette thèse plagiaire, comme telle retirée du catalogue de l’Atelier national de reproduction des thèses (ANRT), est aussi évoqué dans l’article 400 pages de plagiats, 20,33 euros).
Alain LELU est Professeur d’université (Sciences le l’information et de la communication, 71e section du Conseil national les universités – CNU). Il a été maître de conférences à l’Université Paris 8 et membre du Laboratoire Paragraphe de 1993 à 2000.
La question n’est pas tant celle des plagiaires – ceux que je connais plagient parce qu’ils ne sont capables ni d’aligner une demi-phrase de français correct, ni l’ombre d’une idée scientifique originale en quelque langue que ce soit – mais celle de l’institution qui a permis à ces petits malins de s’introduire, puis de prospérer.
On est en droit de s’interroger au mieux sur la conformité de la section 71 du CNU aux critères académiques, au pire sur l’évolution de larges secteurs de l’Université : ont-ils encore besoin de chercheurs ? Ou bien de simples imposteurs, gestionnaires et organisateurs de projets et colloques, leur suffisent-ils ?
À constater le silence des autorités qui poursuivent leur route comme si de rien n’était, j’ai bien peur que la réponse soit : oui !
Alain LELU, Professeur d’université
JND : Pour la première fois, concernant Paris 8, un représentant du Ministère paraît mettre en demeure la direction de l’université d’agir (voir ci-dessus, la note 1). Sait-on jamais ! Il ne faut pas désespérer.
Alain LELU
juin 13th, 2013 at 6:39 lien permanent
A l’évidence, cet égaré s’est fait une spécialité des causes perdues, et ce sur un mode particulièrement odieux : j’ai gardé le vif souvenir de la façon dont il s’est illustré, lors du dernier massacre de masse perpétré par l’armée israélienne dans la bande de Gaza, en 2009, par la publication d’une tribune particulièrement vindicative dans Le Monde (21/09/2009), intitulée Le Juif, coupable universel, renversant sur le mode le plus platement démagogique qui soit la charge de l’accusation.
Aujourd’hui, il récidive en faisant rempart de son corps devant les plagiaires universitaires et assimilés. C’est un Erostrate qui, on l’imagine, tire des traites sur ses sorties nihilistes, destinées à rappeler au public l’existence d’un écrivain en peine de renommée, méconnu sous le nom de Pierre Jourde.
Plaudite, cives !
Alain BROSSAT, Professeur émérite (Paris 8).
JND : Dans la même veine, on lira Le vieux monsieur indigné, une charge de Pierre Jourde contre Stéphane Hessel à propos de la Palestine.
Notons que l’attitude de Pierre Jourde qui, à mon propos, en appelle à Torquemada tranche singulièrement avec la prudence sur l’affaire Bernheim du Président du CRIF, Richard Prasquier. Dans un communiqué, ce dernier avait tenu à souligner : « Il ne faut pas a priori considérer que les enquêtes qui ont abouti à la révélation des plagiats [de Gilles Bernheim] sont une forme d’inquisition. Nous n’avons pas d’élément caractérisant une volonté de nuire. Ces recherches sont parfaitement légitimes et les sites qui en sont à l’origine des découvertes, de niveau universitaire pour la plupart, défendent un droit de l’homme trop facilement violé, celui de la propriété intellectuelle« .
Chez Pierre Jourde par contre, la volonté de nuire et la mauvaise foi sont évidentes.
Alain BROSSAT
juin 14th, 2013 at 7:34 lien permanent
J’ai lu l’article de M. Pierre Jourde et la réponse de M. Jean-Noël Darde. J’ai remarqué qu’il est toujours possible de poster un commentaire sur le blog de M. Darde alors qu’il est impossible de le faire sur celui de M. Jourde (les commentaires sont fermés).
Vous commencez votre article sur la nécessité « indiscutable » d’un combat contre le plagiat. Il est alors curieux de vous en prendre à M. Darde qui a décidé de réagir par rapport à d’autres universitaires qui préfèrent fermer les yeux.
Qu’en France, des plagiaires puissent être élus au Conseil National des Universités a de quoi surprendre. M. Jourde, qu’en pensez-vous ?
Mehdi HAROUN
Maître de conférences (Algérie).
JND : Oui, le blog de P. Jourde a été rapidement fermé aux commentaires. Mais les commentaires sont aussi rapidement fermés pour ses autres articles sur le même blog.
Il reste que cela lui évite de répondre aux bonnes questions : la mienne –
Qu’aurait fait le professeur de littérature Pierre Jourde dans les situations auxquelles j’ai été confronté ? – celle d’Alain Lelu : où Pierre Jourde est-il allé ramasser ses fausses informations ?
Mehdi HAROUN
juin 15th, 2013 at 3:38 lien permanent
Si besoin en était, votre réponse solide et argumentée vient démentir point par point le contenu de la charge menée contre vous par M. Jourde.
Ayant lu attentivement l’article qui vous était consacré et votre réponse sur ce blog, je dirai simplement ceci : Pierre Jourde se trompe de combat et quelle faute de goût en vérité – surtout de la part d’un universitaire – que de s’en prendre, à travers vous, aux personnes de parfaite intégrité qui tentent d’élever des digues face au triste phénomène du plagiat !
Il faut croire que M. Jourde n’a jamais consulté les pourcentages extraordinairement élevés de lycéens et d’étudiants qui, de leur propre aveu, reconnaissent avoir eu recours, ponctuellement ou plus régulièrement, au « copier-coller ».
Cette réalité peut rattraper chacun à tout moment par le biais d’un mémoire ou d’une thèse lus un peu trop rapidement. Le vrai courage – qui par là même expose aux coups tordus de plagiaires dont la mauvaise foi est souvent sans limites – c’est effectivement la mise en évidence de ces graves manquements à la déontologie universitaire. A ce titre votre action, comme celle de Mme Maurel-Indart, mérite vraiment d’être saluée.
M. Jourde ne sort pas grandi de cette grossière tentative de dénigrement.
Christophe Giraud
Christophe GIRAUD
juin 17th, 2013 at 7:56 lien permanent
Jacques Bolo, victime de plagiats (plagiats que Pascal Binczak, président de l’Université Paris 8, a préféré ignorer, cf la note 1 de cet article) a mis en ligne Les faux culs du plagiat, une réaction au texte de Pierre Jourde.
Jacques BOLO
juillet 5th, 2013 at 8:32 lien permanent
Pierre Jourde était en service commandé. Impossible de comprendre son attaque contre celui qui a fait tomber le masque d’un hypocrite comme Bernheim alors qu’il a gagné son strapontin médiatique en démasquant les fausses plumes.
Nul doute que Jourde, rebelle de salon, s’est plié à une commande pour descendre un intellectuel qui a le courage de cogner sur les Puissants (alors que lui n’attaque que des épouvantails !).
Pour Jourde il y a donc imposteurs et imposteurs. Tous ne doivent pas être traités de la même façon.
Fabrice William
Fabrice WILLIAM
juillet 9th, 2013 at 9:43 lien permanent