Similitudes en couches épaisses

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La publication de cet article a favorisé les démarches d’Éric Guiot auprès des éditions Elsevier.
 
J.N. Darde
Avant-propos
Le site Archéologie du copier-coller s’ouvre à tous ceux qui souhaitent présenter des cas soigneusement documentés de « similitudes » dans des travaux universitaires. En premier lieu, ce sont les victimes de ces agissements, comme ici Éric Guiot, physicien, qui peuvent souhaiter exposer publiquement des faits qui les concernent.
 Le cas présenté par Éric Guiot appartient au domaine de la 28e section du CNU (Milieux denses et matériaux). Les physiciens sont donc les mieux placés pour apprécier l’ampleur des similitudes ici mises en scène. En effet, ces similitudes concernent du texte, mais surtout – et c’est le principal –  le travail expérimental dont le texte d’Éric Guiot rend compte.
Il reste que sans posséder le savoir d’un physicien, même un jeune lycéen est à même de comprendre que les travaux de M. A. Djouadi posent des problèmes qui ne sont pas seulement ceux des films minces de Niture de Bore cubique.
Et les instances et autorités universitaires ?
Elles ne verront rien, elles ne feront rien. Notre propre expérience en la matière auprès de la Commission  déontologie et le Comité d’éthique (voir note 1) de l’Université Paris 8, auprès du bureau de la 71e section du CNU (Sciences de l’information et de la communication), et aussi auprès de la présidente et du bureau de la Conférence permanente du Conseil National des Universités  (CP-CNU) nous ont convaincu que ce type d’agissement est aujourd’hui chose parfaitement tolérée. Au besoin, les plus hautes instances de l’Université protègent et soutiennent les enseignants-chercheurs qui s’adonnent à de telles pratiques.

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SIMILITUDES EN COUCHES ÉPAISSES

Éric GUIOT

Thèse Éric GuiotDoctorant à l’ENSAM de Cluny (École nationale supérieure d’arts et métiers), j’ai travaillé sur ma thèse de 1997 à 2000 environ. Elle était intitulée  « Quelques aspects de la formation de films minces de Nitrure de Bore cubique obtenus par dépôt physique en phase vapeur assisté par faisceau d’ions ». Il s’agissait d’un travail de physique appliquée, avec de très nombreuses expériences. J’effectuais celles-ci au rythme de deux ou trois par semaine, le reste du temps consacré à ma thèse étant occupé à la caractérisation, c’est-à-dire à l’analyse des résultats, aux calculs et à la synthèse de ceux-ci sous forme de courbes. Ainsi chaque « point expérimental » correspond le plus souvent à plusieurs journées de travail.

1-Guiot-Djouadi

Mes recherches se sont effectuées les premiers mois sous la direction de M.A. Djouadi, puis, pour différentes raisons – entre autres parce qu’il ne possédait pas l’Habilitation à diriger des recherches – sous l’autorité du directeur de recherche de l’école, M. M. Lambertin, d’une grande compétence. Je n’ai dès lors plus été sous l’autorité de M.A.Djouadi et mes plans d’expériences, comme la rédaction de ma thèse, ont été décidés indépendamment de lui.

J’ai soutenu ma thèse à l’ENSAM de Cluny le 6 avril 2000 et ai obtenu la mention « Très Honorable ». Le jury était composé de M. J.J. Hantzpergue (professeur, ENSAM Angers), M. A. Catherinot (professeur, Université de Limoges), M. Nouet (Directeur de Recherches CNRS, Université de Caen), M. Djouadi (Maitre de conférences, ENSAM Cluny à l’époque), M. Gautherin (Professeur, ENSAM Paris) et Mme Stambouli (Chargé de Recherches CNRS, CNRS Grenoble). Les trois membres les plus titrés du jury auraient été favorables aux « Félicitations », mais cette mention a été bloquée localement.

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2 Guiot–DjouadiCe n’est que bien plus tard, en 2009, que je me suis rendu compte qu’une partie essentielle de ma thèse avait très largement inspiré  les auteurs d’un article paru en 2004 dans le journal « Surface and Coating Technology » : « Deposition of boron nitride films by PVD methods : transition from h-BN to c-BN ».

J’ai en effet observé que mes résultats expérimentaux, présentés sous forme de courbes, y sont reproduits sans que mon travail de thèse ne soit jamais cité, ni dans le corps du texte, ni même en bibliographie. Pire, des passages de ma thèse sont également reproduits à l’identique, ou par reformulation paraphrastique, en tenant compte, bien sûr, de la traduction vers l’anglais.

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Cet article, paru dans Surface and coating etchnology (n° 180-181; pp. 174-177; 2004), est co-signé par M.A.Djouadi (Laboratoire des couches minces, Institut des matériaux Jean Rouxel, à Nantes), A. Vasin (ENSAM, LABOMAP, Cluny), C. Nouveau (ENSAM, LABOMAP, Cluny), B. Angleraud et P.Y Tessier. J’ai des raisons de penser qu’il a été principalement écrit par le premier auteur. Je note également que la date d’écriture de cet article est postérieure au départ du premier auteur, M.A. Djouadi, de l’ENSAM Cluny.

3 Guiot-Djouadi

Cet article s’inspire de deux chapitres de ma thèse et les résume à vrai dire assez maladroitement. Il en reprend les points les plus importants et les résultats expérimentaux essentiels. Tout ceci sans jamais faire référence au texte original, ma thèse, et sans jamais me citer.
L’auteur principal et ses cosignataires ont-ils effectué les expériences qui leurs auraient permis d’arriver à des résultats identiques aux miens ? Il est permis d’en douter.

Je montre – voir ci-contre, ou ce fichier thèse Guiot-article Djouadi – un certain nombre d’éléments de comparaison afin que le lecteur puisse se faire une opinion. Je précise pour la commodité de lecture que les expressions « hexagonal /SP2 » et « cubique/SP3 » sont synonymes dans le contexte de ce travail, ainsi que « Ar/B » et « FAR/FB », soit rapport de flux Argon sur Bore.

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Note 1 : Le Comité d’éthique de l’Université Paris 8 est présidée par Michèle Montreuil, Professeur de Psychologie et Membre du CNU 16. Il est composé de 12 membres – six membres de Paris 8 et six membres extérieurs, dont Jacques Robert, ancien membre du Conseil constitutionnel et Président du Centre français de droit comparé.

Ce comité a tenu sa première réunion un premier avril (1er avril 2013). Au nom d’une éthique bien comprise, il ne s’est pas attaqué aux problèmes concrets des thèses plagiaires soutenues et validées à Paris 8 et des cas de ses enseignants-chercheurs plagiaires. Mais le Comité d’éthique et la direction de l’Université Paris 8 ont décidé l’organisation d’un colloque… sur le plagiat, en juin 2014.

Dans le cadre de l’organisation de ce colloque, le Comité d’éthique a recueilli l’avis et les suggestions des quatre directeurs des Écoles doctorales de Paris 8…. dont l’un, plagiaire avéré.

Le colloque sera organisé dans les nouveaux locaux des Archives nationales, à Saint-Denis. Le Professeur Jean-Claude Ameisen, Président du Comité consultatif national d’éthique, est pressenti pour être le « Grand témoin » de ce curieux colloque sur le plagiat organisé par une université qui tolère les plagiats de ses enseignants-chercheurs. On attend avec intérêt l’intervention de Jean-Claude Ameisen et les communications des intervenants sur l’éthique du plagiat.

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Les démarches d’Éric Guiot auprès des éditions Elsevier et  leurs résultats.

Le nom d'Éric Guiot est maintenant cité en tête de l'article. Mais les autres "ex-auteurs" ont tenu à ce que leurs noms restent accolés à celui d'Éric Guyot ! Le

Le nom d’Éric Guiot est maintenant cité en tête de l’article. Mais les autres « ex-auteurs » ont tenu à ce que leurs noms restent accolés à celui d’Éric Guyot !

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Le résultat est là, ci contre :

Les éditions Elsevier ont joint un Corrigendum à l’ancien formulaire de présentation de l’article « Quelques aspects de la formation de films minces de Nitrure de Bore cubique obtenus par dépôt physique en phase vapeur assisté par faisceau d’ions ».

L’aspect comique de l’affaire est que les « ex-auteurs » de l’article contesté – M.A.Djouadi (Laboratoire des couches minces, Institut des matériaux Jean Rouxel, à Nantes), A. Vasin (ENSAM, LABOMAP, Cluny), C. Nouveau (ENSAM, LABOMAP, Cluny), B. Angleraud et P.Y Tessier – ont tenu à ce que leurs noms restent affichés et donc associés à ce méfait. J.-N. Darde

LES DÉMARCHES D’ÉRIC GUIOT

Après la publication sur le blog Archéologie du copier-coller de l’article ci-dessus consacré aux copiés-collés effectués depuis ma thèse pour la réaction de l’article « Deposition of boron nitride films by PVD methods : transition  from h-BN to c-BN », j’ai pris contact avec les éditions Elsevier pour leur signaler ce problème.

Elsevier a pris mon cas en considération. Ils m’ont tout d’abord demandé une copie de ma thèse et effectué les comparaisons. Puis ils ont contacté les autres « auteurs » qui se sont défendus en prétendant qu’ils avaient essayé sans succès de me joindre à l’époque de la rédaction de cet article.
J’ai facilement pu démontrer à mon interlocuteur d’Elsevier que j’ai toujours été joignable et qu’il s’agissait bien d’une volonté spécifique de certains de ces « auteurs » de s’approprier mon travail.
En effet, rien ne les empêchait de placer des guillemets pour encadrer les textes qui m’ont été empruntés et de citer ma thèse en notes et en bibliographie. De même, ils pouvaient  placer mon nom au bas des graphes qui ont été empruntés à ma thèse.

Mes interlocuteurs d’Elsevier ont reconnu le bien fondé de mes arguments et… m’ont alors proposé de placer mon nom dans les remerciements de cet article !
J’ai bien évidemment refusé cette première proposition et insisté pour être le premier auteur de cet article. J’ai également demandé l’éviction des trois faux « auteurs » du laboratoire de Nantes.

Mes interlocuteurs d’Elsevier ont toutefois refusé cette dernière demande, non pas parce qu’ils considéraient que ces « auteurs » aient réellement contribué à la rédaction de cet article, mais au curieux prétexte que l’article ayant déjà été cité plusieurs fois dans d’autres publications, il était difficile de retirer ces noms.

Nous sommes finalement parvenus à un compromis qui est effectif depuis février : je suis reconnu comme le premier auteur de cet article, la mention des auteurs suivants n’étant pas modifiés. Un corrigendum, publié en dessous de l’article, officialise cette modification. Ce corrigendum  cite le titre de ma thèse et souligne que cet article en est issu.
Ce compromis correspond, j’ai pu m’en assurer, à la manière dont Elsevier gère généralement ce type de situation.

Pour conclure, je suis plutôt satisfait de ce compromis et de l’attitude d’Elsevier vis-à-vis de moi. Je tiens à remercier Jean-Noël Darde pour avoir pris mon cas en considération et pour des conseils judicieux qu’il m’a donnés au cours de ces (assez longues) négociations.

Eric Guiot

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2 réponses to “Similitudes en couches épaisses”

  1. Christophe CARDINAUD est chercheur (CNRS) à l’Institut des Matériaux Jean ROUXEL (IMN, Nantes) :
    Bonjour,
    La notion de plagiat pour l’article « Similitude en couches épaisses » me parait exagérée.
    Les recherches effectuées par un doctorant ne lui appartiennent pas, elles sont la propriété du laboratoire où il effectue ses travaux et de l’organisme de tutelle de celui-ci. D’un point de vue intellectuel, elles appartiennent autant au doctorant qu’à ces encadrants. Il n’est donc pas anormal que des résultats de thèse puissent se retrouver dans des articles écrits par un encadrant ultérieurement. Certes il est normal de citer à cette occasion les travaux du doctorant par les articles écrits au cours de la thèse… Encore faut-il qu’ils existent.
    M Guiot relate que son directeur de thèse a été M Lambertin et non M Djouadi. Il est alors surprenant que le premier ne fasse pas partie du jury de soutenance alors que le second y est. Permettez-moi de vous rappeler que la présence du directeur de thèse au jury de soutenance est une obligation sous peine de nullité. Auriez-vous été abusé par M Guiot ? A vous d’en décider.

    JND : Où avez-vous lu le terme « plagiat » dans l’article d’Éric Guiot ? Je constate que c’est vous qui êtes ici le premier à employer ce mot qui fâche.
    Éric Guiot a écrit : « une partie essentielle de ma thèse avait très largement inspiré les auteurs d’un article paru en 2004 dans le journal « Surface and Coating Technology » : « Deposition of boron nitride films by PVD methods : transition from h-BN to c-BN ». N’est-ce pas vrai ? Vous semblez d’ailleurs en convenir…
    Votre argument « Certes, il est normal de citer à cette occasion les travaux du doctorant par les articles écrits au cours de la thèse… Encore faut-il qu’ils existent. » est assez spécieux. Restons sérieux, à défaut d’articles d’Éric Guiot… les auteurs de l’article « Deposition of boron nitride films by PVD methods : transition from h-BN to c-BNs » pouvaient citer sa thèse !
    Les physiciens et les chercheurs de bonne foi interprèteront comme il se doit ces deux textes mis en vis-à-vis.

     

    Christophe Cardinaud

  2. Christophe CARDINAUD est chercheur (CNRS) à l’Institut des Matériaux Jean ROUXEL (IMN, Nantes) :
    Une information complémentaire à mon commentaire précédent: toute personne qui s’intéressera à l’article mis en cause constatera qu’il fait explicitement référence aux travaux de M Guiot (3 articles cités dont il est co-auteur). Dans ces conditions, je ne vois pas où est le plagiat.

    JND : Vous revenez à la charge en utilisant à nouveau cet horrible terme de « plagiat ».
    C’est compris, pour un physicien de l’Institut des Matériaux Jean ROUXEL (IMN) ce n’est pas du plagiat, juste des similitudes. C’est précisément ce qu’Éric GUIOT a écrit sur ce blog.
    Il reste que plutôt que citer trois articles hors-sujet dont Éric GUIOT est le co-auteur, il aurait été plus pertinent de citer sa thèse dont il est, que je sache, le seul auteur.
    J’ajoute : Membre de l’Institut des Matériaux Jean ROUXEL (IMN), vous reconnaissez que dans l’article incriminé, co-signé en 2004 par plusieurs membres de cet institut nantais, on retrouve les résultats des expériences d’Éric GUIOT réalisées à Cluny pour sa thèse soutenue en 2000.
    Ce blog est naturellement ouvert aux commentaires des co-signataires de l’article mis en cause.

     

    Christophe Cardinaud